Visites aux sommets
Une légende maorie raconte qu'autrefois, les volcans vivaient tous au centre de l'île du Nord, près du lac Taupo. Tongariro et Taranaki, deux jeunes et beaux volcans brûlaient tous deux d'amour pour Pihanga, un joli cratère aux reliefs attirants. Tongariro séduisit cette beauté explosive mais un jour qu'il avait les flancs tournés, Taranaki la lui déroba.
Tongariro fumant de rage défia Taranaki. Et le légitime lava l'affront dans la lave et les larmes. Taranaki, l'amant audacieux, fut chassé du clan et dû s'exiler à l'ouest, seul.
On raconte que les plus de 300 ruisseaux qui coulent le long de ses pentes sont formés par les larmes qu'il verse toujours pour Pihanga.
Forts de cette légende, nous avons voulu voir ce qu'étaient devenus les deux rivaux. D'abord au Parc National du Tongariro, prenant bien garde de ne pas fâcher le volcan, même si aujourd'hui Tongariro n'est plus le bouillonnant sommet d'antan. Les Monts Ruapehu et Ngauruhoe le dépassent allègrement et font une petite éruption à l'occasion.
On sent tout de suite que l'homme n'est que toléré dans cet endroit. On a été accueilli par des vents violents (80 à 100 km/h) et du grésil. La végétation, balayée par les bourrasques, n'est pas mieux lotie; c'est de la steppe à perte de vue.
(NB: pour les connaisseurs, c'est là qu'ont été tournées les scènes du Mordor dans le "Seigneur des Anneaux", le Ngauruhoe étant le "Mont Doom").
Pendant deux jours on a donc attendu en vain que le temps s'améliore et que le ciel se dégage pour pouvoir voir les sommets. Finalement on a abandonné l'idée de gravir le Mont Tongariro et on s'est rabattu sur une balade moins compliquée vers les chutes Taranaki, au pied du Mont Ruapehu.
On était quand même arnachés comme des trappeurs partis pour chasser le grizzlis. Toute la promenade, le Mont Ruapehu a joué à cache-cache avec les nuages. Et puis en fin d'après-midi, au moment où on terminait le parcours, il s'est dévoilé.
Et il nous a suivi tout le long de la route pour l'ouest: la Forgotten World Highway (la route du monde oublié) qui porte bien son nom. Prise complètement par hasard, elle reste aujourd'hui la plus belle route qu'on ait vue et la plus étonnante aussi. Ruapehu dans le rétroviseur, on a suivi la route de l'exil de Taranaki, roulant pendant 150 km sur des petites routes qui serpentent à travers les collines, qui se transforment parfois en piste à une voie au milieu d'une sorte de jungle puis à nouveau des lacets entourés de prés à perte de vue, peuplés de moutons et de vaches. Et quelques fermes par-ci par-là.
A mi-parcours on est entré dans la république de Whangamomona. Une ville qui a connu son heure de gloire au XIXe siècle. Elle servait de point de départ et de ravitaillement aux colons-fermiers partis dompter le grand ouest. Puis elle est tombée dans l'oubli et seuls quelques bâtiments d'époque rappellent encore son fastueux passé.
Depuis 1989, le désormais village s'est auto-proclamé république et on peut même obtenir un passeport à l'hôtel !
Une fois Ruapehu perdu de vue pour de bon, c'est Taranaki qui est venu à notre rencontre, à la tombée de la nuit, dans son habit de lumière.
Un bon dodo par dessus ça au camping de Stratford (au pied du mont) et nous revoilà prêts à grimper au sommet... ou presque. Sur les conseils du visitor center, nous sommes partis pour une petite balade dans la forêt dite des "Gobelins" (c'est à cause de la barbe qui pousse aux arbres ici et de son atmosphère fantômatique...si si, ça faisait même un peu peur !) au pied du mont. Et puis, pas encore rassasiés de marche, nous avons bifurqué pour une autre boucle, censée nous amener "to the Stratford plateau". C'est là que nous avons vraiment été contents d'avoir investi dans de la chaussure de rando haute qualité : car à mesure que l'on montait la température descendait, et le niveau de neige augmentait...les chemins en étaient recouverts et par endroits on en avait jusqu'aux chevilles. Un grand moment, où aucun de nous deux n'osait parler, pas sûr sûr d'avoir choisi la bonne option ! Et puis finalement, après une heure de montée et les pieds définitivement mouillés, nous avons été récompensés par une vue superbe. La barrière de nuages franchie, nous avons pu profiter un maximum du sommet enneigé sur fond de ciel bleu. Et au loin en contrebas, la mer de Tasman. C'était bien sûr l'heure du sandwich !
Le temps de finir de l'avaler et le mauvais temps nous rattrapait. Nous sommes du coup redescendus "fissa" sans plus aucune précaution pour nos chaussures ou nos pantalons ! Et de retour à Stratford, nous avons filé à la laverie avant de nous coucher bien au chaud dans nos duvets pour soulager nos mollets !
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